Comment franchir les obstacles pour obtenir la nationalité française?!

Posséder la nationalité française est un rêve pour de nombreux migrants, surtout pour les réfugiés.
Comme beaucoup d’autres, j’ai fait de l’acquisition de la nationalité française mon objectif principal. J’ai
rapidement franchi le premier obstacle, à savoir acquérir un bon niveau en français. En une année,
j’avais atteint le niveau B2 en langue française. À cette époque, la maîtrise de la langue était la seule
condition requise pour les réfugiés souhaitant demander la nationalité. Mais par malchance, une petite
erreur dans l’acte de naissance de mes enfants envoyé par l’OFPRA, m’a coûté près de deux ans
d’attente. Il fallait demander la correction de l’erreur au procureur du tribunal de Paris et à chaque fois
que nous contactions l’OFPRA pour essayer d’obtenir les actes de naissance corrigés, ils nous
répondaient que les documents étaient au bureau du procureur et qu’ils ne pouvaient pas nous aider.
Alors Laurent décida de consacrer une journée entière à tenter de joindre le bureau du procureur à
Paris. Après des heures et des heures d’essais infructueux, il réussit finalement à parler avec un employé
du bureau du procureur. Celui-ci lui répondit que les données de l’acte de naissance avaient été
corrigées et envoyées à l’OFPRA il y avait dix mois déjà. Il fallait donc envoyer une lettre recommandée
au directeur de l’OFPRA pour lui expliquer la situation. Après plusieurs semaines, nous reçûmes un
courrier contenant les données de l’acte de naissance corrigées. À ce moment-là, tout était enfin prêt
pour commencer à constituer le volumineux dossier de demande de nationalité. Mais la loi avait changé
entre-temps, exigeant désormais que le réfugié possède un contrat de travail pour pouvoir prétendre à
la nationalité. J’avais heureusement obtenu mon contrat de travail pendant ce laps de temps.
Préparer un dossier de demande de nationalité n’est absolument pas une tâche facile. Des dizaines de
papiers et de documents doivent être obtenus ici et là. Quinze jours ont été nécessaires pour préparer
un dossier complet dont j’ai vérifié tous les détails avec Laurent avant de l’envoyer par courrier
recommandé au début de l’année 2020. C’est ainsi qu’a commencé l’attente du retour concernant
l’acceptation préliminaire du dossier. Plus de six mois plus tard, le dossier que j'avais envoyé pour la
première fois a été ouvert. Pendant ces six mois, la loi avait de nouveau changé et des documents
supplémentaires étaient désormais requis pour la demande de nationalité. Ainsi, tout le dossier m’a été
renvoyé et j’ai dû recommencer avec de nouveaux documents. Ce nouveau dossier m’a pris plusieurs
semaines et je l’ai renvoyé en septembre 2020.
J’attendais depuis des mois l’approbation initiale de mon dossier, qui n’est jamais arrivée. Alors j’ai
envoyé un e-mail au préfet pour vérifier que mon dossier avait été accepté, et la réponse a été positive.
Cela m’a apaisée un peu et j’attendais alors une invitation pour l’entretien personnel.
Après avoir attendu jusqu’au 7 octobre 2021 sans recevoir d’invitation à l’entretien, j’ai finalement été
convoqué pour le 11 octobre, soit seulement trois jours plus tard. J’ai dû me préparer en un temps
record. Après réflexion, j’ai décidé de compter sur mes talents et mes connaissances générales. Ainsi,
l’entretien s’est bien déroulé : rapide et agréable, sans ressentir de tension particulière, tout s’est passé
en douceur.
Nous sommes ensuite passés à la dernière phase d'attente : la décision finale d’acceptation ou de refus
de ma demande de nationalité.
Un jour d’août 2022, j’ai reçu une lettre de la municipalité m’informant que mon nom figurait désormais
sur les listes électorales de la ville de Haguenau. Au début, je n’ai rien compris et j’ai envoyé le courrier à
Laurent. Il m’a dit que si j’étais inscrite sur les listes électorales, cela signifiait que j’avais obtenu la
nationalité. Mais comment avais-je obtenu la nationalité sans en avoir été informée ? C’est ainsi que j’ai
commencé à chercher si un e-mail m’avait été envoyé pour m’en informer. Après des heures de
recherche, j’ai découvert un e-mail qui était arrivé dans les spams il y avait plus de deux mois. Dans cet
e-mail, nous avons trouvé la date de publication de mon nom et de ceux de mes enfants dans le journal
officiel. Laurent était bien sûr celui qui l’avait trouvé.
Et là, nous avons commencé rapidement ce qu’il fallait faire pour obtenir la carte d’identité française, le
passeport français, et obtenir un rendez-vous à la mairie pour la demande de la carte d’identité, ce qui n’a pas été facile puisque je n’ai pas pu trouver de rendez-vous avant trois mois. Cependant, j’étais plus
sereine cette fois-ci car j’avais obtenu la nationalité et recevoir la carte nationale d’identité n’était
qu’une question de temps.
Récemment, il y a quelques semaines, j’ai reçu une lettre m’invitant à la cérémonie de remise officielle
du décret de naturalisation, après presque deux ans depuis l’obtention de ma nationalité. Le jour tant
attendu était arrivé et j’avais préparé tous les documents demandés dans l’invitation à la cérémonie. Je
suis allée avec un sourire sur mon visage et une joie profonde dans mon cœur, bien que je ressentais
une légère douleur car mes enfants n’avaient pas le droit de m’accompagner en ce jour spécial.
Nous avons atteint la préfecture et là, un sentiment étrange m’a envahie lorsque je suis passée près de
la foule et de la longue file de personnes étrangères attendant d’entrer dans la préfecture, tandis que je
suis entrée en douceur par une autre entrée. Je ne savais pas si je devais ressentir de la tristesse ou de la
joie ; mes sentiments étaient très mélangés. Nous sommes entrés et des employés nous ont accueillis
avec des sourires et nous ont traités avec gentillesse, rien de semblable à ce que nous avions vécu
auparavant à la préfecture. Nous sommes entrés dans le hall d’accueil où j’ai découvert que les
documents demandés n’étaient pas vraiment nécessaires et m’ont été rendus. Je ne sais pas pourquoi ils ont demandé tous ces documents s’ils ne les voulaient pas vraiment. Nous avons ensuite attendu dans
la salle où le secrétaire général de la préfecture, certains messieurs, des élus et des hauts fonctionnaires
de la préfecture sont venus participer à la cérémonie. C’est là que nous avons découvert qu'un des élus
était en retard, et que les organisateurs ont essayé de retarder légèrement la cérémonie pour son
arrivée. Nous avons attendu, mais il n’est pas venu et la cérémonie a commencé sans lui. L’accueil était
chaleureux et les émotions étaient intenses. À la fin de la cérémonie, juste avant de prendre les photos,
le député est arrivé et nous a informés qu’à partir de ce jour (depuis deux ans déjà), nous pourrions
nous présenter aux élections et même occuper sa place. Étant donné que j’étais contrariée par son
retard, tout ce que j’ai pu répondre était que nous avions sérieusement l’intention de prendre sa place.
La cérémonie s’est terminée et avec son intelligence naturelle qui lui a valu son poste de député, il s’est
adressé à moi pour parler et m’a demandé d’où je venais, me complimentant en disant que j’étais
élégante. Pour être franche, sa tactique a fonctionné, car un compliment à une femme dans la
quarantaine est l’une des meilleures façons d’obtenir son pardon.
Comme vous pouvez le voir, le chemin pour obtenir la nationalité française, avec ses barrières, ses
obstacles et ses difficultés, était loin d’être facile. Mais le résultat final a été parfait. Aujourd’hui, je suis
une citoyenne française typique, me plaignant quotidiennement de l’administration et participant aux
grèves.

 

Signé : Kholoud