Ce sont 18 personnes qui ont osé s’engager, s’exposer en nous soumettant un texte. Bravo et merci à eux de s’être prêtés à cet exercice difficile.
Découvrez ci-dessous les textes des deux lauréats dans la catégorie adulte et celui de la lauréate dans la catégorie des – de 16 ans. (Pour rappel, il s’agissait de s’inspirer de la photo en illustration pour produire un texte libre). Laissez-vous toucher par leurs mots…
JE M’APPELLE WAEL
La mer dans mes yeux flous
Seuil, passage, le dernier
Au-delà, mon avenir
J’entrevois l’issue de mon errance
Le sable sous mes pieds nus
Milliers de grains durs, froids
Atomes planqués sous mes cicatrices qui suintent
Je les connais, chacune ; je n’oublie rien
Le ciel, tissu gris et sale
Bouclier implacable, du plomb
La lumière le transperce pourtant
Je neutralise mes angoisses -mon ciel syrien si bleu-
Devant moi les traverses
Rides creusées sur la surface de l’eau
Barrières verticales
Elles ne m’enfermeront pas
Cette nuit je pars, j’embarque,
La rage comme seul bagage
La vie comme carburant
L’énergie du dernier espoir
Je m’appelle Wael
J’avais 16 ans
Ci-git
La promesse échouée
Des lendemains
Morts
Véronique GENTNER (1er prix ex-aequo)
TAPIS FLOTTANT
Vaste plateau calcaire
Cette terre était mienne,
D’où commence le calvaire
À la frontière syrienne.
Espoir et désespoir
Comme solide barda,
Mon cœur bat dans le noir
Aux confins du coma.
Est-ce la vie ou la mort
Comme unique horizon,
Ce continu fracas
Comme seule provision ?
Les miens seraient restés
Prisonniers de la guerre,
Et me voilà lesté
D’une nef vulgaire.
Avec moi quarante fantômes
Sur un tapis flottant,
Et le sel comme atome
Qui charrie dans le vent.
Puis le salut du sable
Sous mon corps fatigué
Serait-ce donc une fable,
Ou me voilà à quai ?
Encore faut-il marcher
Sur ce sol nouveau,
Un continent entier
Retrouver un bateau.
Cette fois-ci pour une île
Dont je ne sais que le nom,
Eldorado de villes
Embrume ma raison.
Dans un ultime baroufle
En cette folle saison,
Et dans un dernier souffle,
Je revois ma maison.
Antoine COMITI (1er prix ex-aequo)
LE SOLEIL DU DÉSESPOIR
Autrefois sur ce sable fin,
S’élevait un soleil pour certains.
Un soleil durement bâtît,
Puis détruit sans répit.
Cette lueur d’espoir,
Quand ils étaient plongés dans le noir,
Ne pouvait que les effleurer,
Sans qu’ils puissent s’y accrocher,
Mais c’était déjà assez.
Le vrai soleil, lui, ne donnait que l’ombre de quelque chose,
Quelque chose d’anéantit,
Quelque chose qui fût
Mais qui n’était plus.
Et cette mer au loin,
Séparée de nous par ces barreaux coquins,
Ne nous rappelant
Que séparation et déchirement,
Et ne nous ramenant
Qu’à ces débris délaissés,
N’évoquant que des restes de déchets.
Malheureusement, l’immigration est une lourde décision,
Qui ne laisse souvent place qu’à la désolation.
Et, quand certains ne faisaient que les rejeter,
D’autres les aidaient
Du mieux qu’ils pouvaient.
Certes les atrocités ne pourront jamais,
Du cœur s’échapper,
Mais quelque peut s’oublier,
Grâce à ces aides procurées.
Mais le mal a déjà gagné
Car ce qui est détruit
Ne peut être, à l’identique reconstruit.
Morgane FLOQUET (prix spécial moins de 16 ans)
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