De la difficulté à fixer des limites… et s’y tenir.

ARDAH est une petite structure. Une association de (très) bonnes volontés qui un jour ont décidé que oui, chacun peut faire quelque chose à son niveau, sur le territoire de Haguenau, pour soulager la détresse du monde, et apporter de l’aide et du soutien là où il en manque. Pour pouvoir agir, il fallait se structurer et devenir personne morale. Alors, à la fin de l’année 2015, les statuts de l’association furent rédigés, et ARDAH créée, sans autre forme de procès, afin de pouvoir porter les initiatives de ce collectif. Rien ne prédestinait l’équipe aux missions qu’elle s’est alors fixées, si ce n’est l’humanité de chacun de ses membres actifs : pas d’expertise dans le droit d’asile, pas de parcours personnel de migration, pas de professionnel de l’action associative ou de l’aide sociale… C’est avec modestie et réalisme que les missions de l’association ont été définies, en respectant un principe simple et sain : « chacun comme il veut, chacun comme il peut et quand il peut », et un mode de décision concertée à toute épreuve.

Du haut de ses 7 ans d’existence, ARDAH a connu des succès, parfois inespérés. Des déroutes aussi. Au gré des « affaires » qu’elle a suivies, l’équipe a fait des rencontres bouleversantes, s’est expertisée dans les méandres du parcours des demandeurs d’asile avec ses échéances, ses jugements, ses recours, ses appels… au point de devenir un acteur local de référence vers qui se tournent les citoyens et les services sociaux. Les bénévoles sont toujours aussi engagés, mais les sollicitations se multiplient avec des situations de plus en plus complexes. Chaque demande appelle une décision d’accompagnement longuement discutée en comité : faut-il s’engager ? peut-on s’engager ? Y a-t-il un avenir possible, sans se retrouver hors la loi, en France ? Les questions de ressources financières et humaines, de légitimité et de compétences, traversent chacune des nombreuses réunions du comité de l’association lorsqu’il s’agit de répondre à un appel à l’aide : une famille injustement déboutée qui n’a plus de logement ni de ressources pour nourrir ses jeunes enfants, un parent en difficulté resté au pays, un élève prometteur qui ne peut finir sa scolarité sans logement… Dire non n’est pas facile, on éprouve du malaise et de la culpabilité à laisser perdurer une situation de souffrance, on aimerait aider tout le monde. Mais si le cœur des membres n’y est pas, heureusement, l’association, elle, n’a pas de cœur : elle a des statuts. Et ceux-ci permettent de tracer les limites de notre action et de soulager nos consciences à refuser certains cas, même si ces refus peuvent être incompris et sont toujours aussi difficiles à annoncer.

C’est avec la plus grande sincérité que nous continuerons donc à assurer les missions originelles de ARDAH, en étant parfois « sur le fil », sur les bords du cadre fixé dans les statuts :

– contribuer, localement et dans la mesure de ses moyens, à l’accueil, l’accompagnement et l’aide à l’inclusion sociale de demandeurs d’asile et réfugiés pendant et après la procédure de reconnaissance du statut de réfugié ;
– contribuer par la réflexion et l’information à la défense du droit d’asile.

Lucile